Dans la mythologie grecque, les Champs Elysées (Elysian Fields) sont une destination accessible uniquement après la mort, une place réservée aux quelques héros et justes qui ont été admis dans la dimension paradisiaque. En musique, Elysian Fields sont un duo musical basé à Brooklyn, dont le surréalisme sonore confirme le mythos de leur nom. Le duo, Jennifer Charles et Oren Bloedow, a été inspiré par Cáo Xuěqín, l’écrivain chinois qui a écrit l’un des quatre grands romans classiques de la littérature chinoise, Dream of the Red Chamber, qui, en Chine, est à peu près aussi célèbre que Shakespeare en anglais. Dans ce projet, ils ont mis en musique certains des poèmes de l’écrivain. Ce qui ressort de la micro-onde sonore alchimique de la création est The Transience of Life, un assemblage d’instruments sublimement utilisés da manière anticonventionnelle avec une touche d’hommage littéraire chinois, le tout lié et scellé dans avec des accroches proprement infectieuses.
En hommage au titre, les petits caprices des compositions sont tout aussi éphémères que le dernier. Quand un rythme devient bon, un autre encore meilleur se fraye un chemin à travers les méandres. Il s’ouvre sur des harmoniques de guitare naturelles, celles qui ressemblent au carillon de votre grand-mère et au chant très respirable de Charles, qui vient de l’autre monde. Mais cela ne dure pas longtemps. Il se transforme en un autre caprice qui déploie ce riff de guitare beurré et débonnaire, puis en un riff excentrique qui se transforme progressivement en quelque chose de plus palpable. Son chant rappelle Adele et la seule constante un peu permanente du LP. De petits tourbillons ambiants étranges font surface dans le son fondamentalement anesthésique.
Le morceau suivant, « Transience Of Life », s’ouvre sur une ligne de guitare acoustique agréable mais curieuse qui s’interroge sur des riffs ascendants. Charles’ semble être dans son élément dans ce morceau au niveau vocal. C’est un morceau vraiment doux et apaisant, qui peut inciter les plus libres d’esprit à une giration langoureuse.
L’instrumentation de l’album est si singulière. Dans « Spurned By The World », cette guitare électrique méticuleuse et comprimée semble s’éveiller continuellement en s’émerveillant de la façon dont elle reprend conscience dans un environnement différent du précédent. Elle a une volonté propre dans le schéma de la chanson. Il y a une ligne de guitare sinueuse dans « Sorrow Amidst Joy », qui sonne comme si elle n’avait rien de bon, cherchant à semer la zizanie comme un vandale à l’affût dans la nuit urbaine, en même temps que cet accord discordant de déni de message qui résonne avec force. On dirait Siouxsie Sioux, car elle se lamente et jubile à la fois devant le son post-punky, chuchotant « inutile » pour s’éteindre. À cet égard, toute chanteuse qui peut ressembler à la fois à Adele et à Siouxsie Sioux dans le même album devrait mériter l’admiration de tous).
La piste dix, « The Indifference Of Heaven », est particulièrement étrange. Elle commence par des coups de piano très bas qui instillent immédiatement un sentiment de solennité et de rumination. « Le passé me semble plus réel que le présent maintenant » (The past seems realer than the present to me now), montre Charles contre les arpèges numérisés. Sa cadence est un peu décalée par rapport à celle des crochets, ce qui ne donne pas crédit à ses prouesses musicales. Pourtant, c’est le seul glissement identifiable de l’album alors qu’elle médite sur « l’éternité sous la vaste indifférence du ciel » ( -eternity under the vast indifference of heave- dans un mode de vide existentiel abject. Ce vide existentiel abject se poursuit dans le dernier morceau (« The Birds Scatter To The Wood »), où Charles chante les paroles les plus déprimantes que l’humanité ait jamais connues : « Tout ce qui reste est vide et la tombe pour cela » (All that’s left is emptiness/ and the grave for it). Et, bien que ce soit l’impression de « walk-away » de l’album, ne laissez pas cela entacher la magnanimité de l’ensemble. C’est un album vraiment merveilleux, même, et surtout paut-être, avec tout ce contenu peu enthousiasmant.
Elysian Fields a produit une sorte de chef-d’œuvre. Des parties de violon et de piri occasionnelles à la discorporate, sorte de chant fantasmatique, aux mélodies syncopées et fondatrices de genre, The Transience of Life est destiné à étinceler
****