Il existe une force électrique entre le multi-instrumentiste Spencer Zahn et l’artiste indépendant Dawn Richard. Tous deux diffèrent dans leur art, mais se rejoignent dans leur volonté de s’écarter des chemins tracés pour eux. Cette collaboration est d’une importance capitale.
Pigments arrive à un moment clé de la carrière des deux musiciens. Le statut créatif actuel de Dawn Richard est difficile à cerner, car elle possède une grande connaissance de la musique commerciale. Après tout, elle était l’un des membres principaux de Danity Kane. Pourtant, on aurait tort de croire que la chanteuse est liée à un son centré sur la pop, prompte à tout mettre de côté pour la niche et l’alternatif. Ce nouvel effort créatif marque un tournant pour Richard, qui travaille désormais aux côtés des amples paysages sonores de Zahn, assuré de sa propre transition en tant qu’artiste solo. Sur 11 titres, le duo expérimente des tempos ambiants et une instrumentation plus grande que nature pour former un projet plein de mouvement, consacré à la Nouvelle-Orléans, la ville natale de Richard.
Le morceau d’ouverture « Coral » est précédé d’une clarinette pure et aérienne qui devient un élément proéminent tout au long de la liste de morceaux. Avec ses guitares et ses notes allongées, l’écoute dégage une qualité éthérée qui se retrouve dans le résonnant « Sandstone ». Marquant l’entrée de Richard, les tons du chanteur sont glacials jusqu’au bout, concentrés dans leur livraison au laser. Zahn se concentre sur sa capacité inhérente à conduire l’auditeur dans de nouvelles directions, allant de carillons scintillants au caractère plus évocateur d’un saxophone. C’est une performance émouvante qui explore le désir – « Je veux être plus, être plus que, voir plus, voir plus que tes yeux… » (I want to be more, be more than, see more, see more than your eyes…).
Tout aussi frappant dans son intégralité est « Vantablack », une exploration apaisante de soi qui se prête à la chorégraphie. Avec son rythme pulsé, la production plus spacieuse met en valeur l’intention de la chanteuse de donner du pouvoir, brodée sur des voix tourbillonnantes qui jouent avec la proximité et les harmonies.
Des morceaux plus longs comme « Sienna » mettent en lumière le travail plus complexe de Zahn, qui emmène ses auditeurs dans un voyage précieux. Contrastant avec les synthés délicats et les textures sonores des instruments à vent, il tisse chaque élément pour donner un sentiment de libération progressive. Le timing semble être un outil critique dans ‘Pigments’, permettant des arrangements plus ambitieux qui défient leur contexte actuel, rejetant les attentes précipitées de la culture numérique. Néanmoins, cela n’empêche pas Zahn d’embrasser le uptempo, en se lançant dans des percussions plus électroniques sur les fumeux « Crimson » ou « Umber ».
Du début à la fin, Dawn Richard et Spencer Zahn ont créé une œuvre vraiment rafraîchissante, une expérience sans faille, à cet égard Pigments encourage les gens à sortir de leur zone de confort, à écouter plus attentivement et plus ouvertement.
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