C Duncan: « Alluvion »

Sorti en 2015, le premier album de Christopher Duncan, Architect, était en quelque sorte une aberration.Auto-écrit, auto-joué et auto-enregistré, il positionnait le Glaswegian timide dans le moule du chef d’orchestre, un rôle dans lequel il reprenait habilement le travail d’icônes telles que Nick Drake, John Grant, Fleet Foxes et même Burt Bacharach.

Ces affectueux hommages lui ont valu une nomination au Mercury Prize et de nombreux mots gentils, mais bien que l’Écossais attire la bienveillance à son égard, ses suites ultérieures The Midnight Sun (2017) et Health (2019) ont toutes deux eu l’impression, par moments, de chercher à encapsuler un pop-modernisme qui n’était pas naturel.

Alluvium le retrouve installé dans la placide ville de Helensburgh, sur la côte ouest, et dans le but de retrouver la chaleur décomplexée de ses débuts.

La plupart de ses chansons traitent de changements, qu’ils soient abstraits ou personnels ; la trop brève conclusion Upon The Table voit l’amour comme un renouveau et perpétuel, la guitare bercée et les harmonies douloureuses un moment qui pourrait être un chant de Noël aux tons sépia.

En effet, lorsqu’il s’agit de questions de cœur, Duncan s’est, semble-t-il, longtemps considéré comme un conteur fasciné. Le tourbillon « Torso » fait en partie référence au « Colibri » du poète français Leconte de Lisle, qui conceptualise un désir si insatiable que, dans le chant, l’amant concerné sacrifierait tout sans jamais être comblé.

Sur le morceau plus droit « Bell Toll », avec ses remplissages de piano et le retour bienvenu du sifflet, il explore l’idée que l’incertitude devient une constante, qu’un état de flux émotionnel est le nouveau statu quo.

Une autre partie de la réinitialisation est un retour sans honte à l’intemporel, MOR axé sur la douceur : l’ouverture Air commence par les mots, « Nous sommes à la fin », un dessin conscient de la ligne derrière laquelle est simplement un passé qui ne peut être changé.

Le style Laurel Canyon de Earth est aussi peu exigeant, tandis que son successeur « The Wedding Song », tout aussi doux, fait même appel aux parents du chanteur pour jouer des cordes.

Musicien de formation classique comme eux, une caractéristique de longue date du travail de Duncan est sa volonté d’utiliser ces structures comme un pont entre son passé et son présent. Ici, les cascades de piano de « Lullaby » font écho à une ambiance froide, mais c’est sur la chanson-titre que l’on retrouve le plus cette délicate mise à l’échelle, bien que son clavecin ondulant soit surpris par un bref solo de guitare aux accents rock.

Ce n’est guère téméraire, mais quelle que soit la phase dans laquelle se trouve sa carrière à ce jour, la production a toujours été la plus agréable à écouter lorsqu’elle est abordée comme une sorte de chasse au trésor, un sentier parsemé de découvertes modestes et inattendues.

« Heaven » – inspiré d’une conversation avec sa grand-mère décédée sur sa vie – est l’archétype de la pop diaphane dans laquelle il brille, mais c’est la rêverie Carpenters-esque de « We Have A Lifetime » qui rassemble habilement tous ces mondes, une ballade tranquille servie avec beaucoup de tendresse.

Faire face à un nouveau départ après que les circonstances aient changé et que les opportunités se soient succédées est généralement un processus ardu, surtout dans un monde de la musique qui semble exiger qu’un feu de joie de ce que vous avez fait et chéri auparavant soit un sacrifice nécessaire.

Le mérite en revient donc à ceux qui considèrent la croissance comme un processus consistant à façonner leur travail à partir du meilleur d’eux-mêmes, où qu’il se trouve honnêtement ; Alluvium trouve Christopher Duncan toujours dans cette niche, ni plus ni moins qu’une aberration par rapport à ses débuts et ni plus ni moins digne de notre attention maintenant.

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