Au train où vont les choses, le titre du premier album de Why Bonnie, groupe originaire de Brooklyn mais relogé désormais à Austin, Texas, pourrait bien être compris par tous d’ici peu. En attendant, le quintet, mené par Blair Howerton, revendique un mélange particulier de sel, de chaleur, de sueur et, d’une manière ou d’une autre, assez d’énergie pour délivrer plus qu’une juste part d’arrogance. Si vous avez fait l’expérience de l’oppression d’une boulangerie de fin d’été le long du couloir du I-10 à l’est du Texas, vous savez que l’explosion provenant de la guitare de Sam Houdek sur le morceau d’ouverture, » Sailor Mouth « , est censée représenter cette intensité elle-même, et non une quelconque réaction énergique à celle-ci.
Sur leur premier album Keeled Scales, Howerton et son équipe s’éloignent intelligemment de leurs premiers penchants indie pop pour privilégier une approche variée et, parfois, musclée. En même temps, ils s’accrochent à l’éthos de leur état d’origine pour les guider sur leur chemin. « Sailor Mouth », « Lot’s Wife » et le plus lent à s’enflammer « Sharp Turn » montrent le punch musical du groupe, tandis que Howerton montre des signes d’une dureté rauque, un peu comme Lydia Loveless, mais avec beaucoup moins de twang. Quant à la claviériste Kendall Powell, elle prête sa touche la plus puissante aux notes d’orgue classiquement groovy de « Galveston ».
« Galveston », ainsi que les atmosphériques « Hot Car » et « Silsbee », ne sont pas très éloignés de la plage de la ville natale de Howerton. Son observation « nous avons perdu la jetée à cause de la saison des ouragans », dans « Galveston », témoigne d’une conscience de fait du mépris de la nature pour les plans des simples mortels. La lenteur laborieuse de « Hot Car » rencontre son sujet, tandis que le début math rock de « Silsbee » cède la place au souvenir poétique de Howerton concernant son frère décédé. Un peu à l’écart du reste de l’album, le style alt-rock de la chanson-titre constitue une signature convaincante pour le groupe naissant.
Why Bonnie couvre beaucoup de terrain sonore sur son premier album et montre qu’il est capable d’aller plus loin sur les routes de la côte du golfe du Mexique ou partout où son chemin le mènera. Même s’il ne s’agit pas d’une immersion totale dans les marécages de Car Wheels de Lucinda Williams ou de The Houston Kid de Rodney Crowell (des comparaisons qui ne sont pas vraiment justes pour des nouveaux venus), Howerton montre sa capacité à puiser dans le jardin de sa jeunesse et à décrire les choses musicalement et par écrit de manière à ce que vous puissiez les ressentir dans vos os. Ce n’est pas sans rappeler « Sailor Mouth » qui télescope le feu de l’enfer de ce jour où la sortie de 90 in November atteint directement et de cette manière vos oreilles.
***1/2