Mary Gauthier: « Dark Enough to See the Stars »

« Fall Apart World », le morceau qui ouvre le nouvel album de Mary Gauthier, Dark Enough to See the Stars, pourrait bien être une chanson parfaite. Les notes de piano luxuriantes de Danny Mitchell flottent au-dessus de ses envolées de B3, posant un lit chatoyant pour les passages de lead vibrato de Juan Solorzano sur les ponts, la voix chaude de Gauthier et les harmonies en spirale de Jaimee Harris et Allison Moorer. La douceur soul des premières notes de la chanson évoque la langueur exquise de l’amour avant que la chanson ne glisse vers ces harmonies aux accents pop qui débordent de l’exubérance et de la joie de l’amour.

Le premier morceau de Gauthier, coécrit avec Ben Glover, navigue glorieusement dans les eaux agitées de l’amour et de la perte, révélant que les moments de douleur et d’obscurité contiennent en eux des lueurs de guérison et de lumière. Après tout, nous ne pouvons voir les étoiles que dans l’obscurité de la nuit et non dans la clarté du jour, tout comme notre amour devient plus fort lorsque nos cœurs ont été brisés par la perte.

Les accords de piano en cascade de Mitchell nous entraînent dans « Amsterdam », une lettre d’amour atmosphérique à une ville : « Hyacinthes et jonquilles, tulipes sur le rebord des fenêtres « (Hyacinths and daffodils, tulips in the windowsills) et à un amoureux : « Baisers sous la pluie d’été, retomber amoureux »(Kisses in the summer rain, falling back in love again). Sur le refrain, Gauthier déclare qu’elle est « All right, feeling all right in Amsterdam tonight », accompagnée par les harmonies call-and-response de Harris et Moorer.

Sur « Thank God for You », les houles de piano et les souches de B3 de Itchell nous emmènent à l’église, alors que Gauthier raconte l’histoire d’un « down so long it looks like up » pour elle. Comme l’histoire du bon Samaritain dans la Bible, les gens religieux passent à côté d’elle parce qu’ils n’entendent pas ses appels à l’aide ou parce qu’ils pratiquent simplement l’amour à distance (en disant qu’ils l’aiment mais sans jamais la toucher ou l’aider). Le salut ne vient que sous la forme d’une autre personne qui aime la chanteuse et la berce de cet amour. La chanson est un témoignage habile de la puissance de la nature incarnée de l’amour et des défauts d’un amour distant, « spirituel », qui laisse des âmes brisées dans son sillage.

La chanson titre s’ouvre de façon dépouillée avec Gauthier chantant sur son fingerpicking ; les premières lignes évoquent le sentiment d’être seul et dépourvu après la mort d’amis chers. Alors que la pedal steel éthérée de Fats Kaplin se déploie et que Harris prête sa voix d’harmonie, la chanson se transforme en un chœur céleste de louange et d’unité. Co-écrite avec Beth Nielsen Chapman, la chanson révèle le génie lyrique du duo dans le refrain de la chanson : « Assez sombre pour voir les étoiles assez sombre pour voir la lumière / Dans un océan noir et profond, au milieu de la nuit / Alors que je m’accroche à ton amour, comme ces lumières d’en haut / J’ai dérivé si loin, il fait assez sombre pour voir les étoiles » (Dark enough to see the stars dark enough to see the light / In an ocean black and deep, in middle of the night / As I hold on to your love, like those lights from up above / I have drifted out so far, it’s dark enough to see the stars).

L’album se termine par une litanie d’une beauté douloureuse, « Till I See You Again », qui équilibre l’espoir de « Forever Young » de Dylan avec la bénédiction traditionnelle irlandaise qui commence par « May the road rise up to meet you ». La chanson de Gauthier s’ouvre sur un souhait simple, « Que l’éternité te tienne dans le creux de sa main »(May eternity hold you in the hollow of her hand), et se termine par un refrain simple et plein d’espoir qui affirme qu’elle retrouvera son bien-aimé – « Till I see you again ». Cette chanson est un témoignage poignant du pouvoir durable de l’amour et de l’espoir face à la perte.

Dark Enough to See the Stars délivre un message opportun : l’amour exige plus que des mots, il exige plus que de répéter les « bonnes » phrases au « bon » moment. L’amour exige de la vulnérabilité, de s’ouvrir à la perte et à la mort, d’embrasser les autres dans leur perte, d’incarner l’amour. Comme nous le montre Gauthier, nous trouvons et donnons de l’amour dans le désordre de nos vies et après avoir surmonté les nuits sombres de nos âmes. L’album de Gauthier brille comme l’un des meilleurs opus americana de l’année jusqu’à présent.

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