L’un des membres du duo de math-rock Ahleuchatistas, Shane Parish, s’est récemment fait une place dans le paysage musical en tant que guitariste free folk où il s’fforce de faire passer des formes musicales plus anciennes, comme le country blues, pour de l’avant-garde. Mais il n’a peut-être jamais remonté aussi loin dans l’histoire de la musique qu’il ne le fait pour Liverpool. Ici, il a rassemblé des reprises de vieux chants de marins datant du début du XIXe siècle.
Il y a eu un certain regain d’intérêt pour les vieux chants de marins ces derniers temps et beaucoup de ceux qui sont contemporains que j’ai entendus sonnent très, eh bien, contemporains. Parish apporte sa propre touche au genre, mais cela n’a rien à voir avec une actualisation. Oui, il y a de la guitare électrique et des accessoires électroniques dans son mélange, mais tout est conçu et réalisé de manière organique. Et c’est en faisant de ces chansons de travail chantées des instrumentaux tout en conservant la résonance des chansons que Parish applique son ingéniosité.
La formule pour y parvenir est en fait très simple : Parish a modelé ses interprétations en se basant uniquement sur la composante vocale de ces chansons, ce qui est de toute façon la façon dont ces shanties étaient initialement interprétées en mer. En transférant uniquement le caractère chanté des shanties dans ses instruments, Parish est capable de garder l’esprit intact tout en transformant complètement le matériel source.
« Liuerpul » enfonce le clou en commençant par une bonne vieille douche de larsen à la guitare électrique, mais elle se sépare rapidement, laissant dans son sillage une section rythmique rock avec une ligne de guitare chatoyante qui retrace la cadence lyrique d’un chant de marins ; c’est une vieille idée habilement recyclée en une nouvelle.
Parish a été ému par la version émouvante d’Anna et Elizabeth de la ballade « Black Eyed Susan », une chanson perdue en mer, alors il l’a reprise lui-même. Il conserve le caractère obsédant de la chanson, et l’illumine même, grâce à une superposition complexe qui inclut des percussions éparses mais efficaces.
Pour « Banks of Newfoundland », Parish utilise une guitare pour donner une impulsion sinistre et l’autre pour « chanter » avec un ton triste, et il y a des cas sur chaque piste où il trouve différentes façons de remanier le son des paroles.
Parish utilise le looping pour le riff irrésistible qu’il a construit pour « Haul Away Joe », augmentant la férocité en ajoutant des effets. Il déploie une stratégie similaire pour « Santy Anno », laissant sa ligne lead solitaire pure sur un fond de distorsion et de pulsation. Le long « Rio Grande » est comme une bande-son pour l’effet calmant d’un voilier naviguant sereinement en haute mer.
Pour tous ceux qui ont eu leur dose de la folie des chants de marins, n’abandonnez pas avant d’avoir eu la chance d’entendre la version évocatrice de Shane Parish sur ces chansons nautiques. Il n’est même pas nécessaire d’aimer les chants de marins pour apprécier Liverpool.
***1/2