Orville Peck: « Bronco »

Avec son identité cachée derrière un masque et se tenant sur la couverture de son deuxième album dans un gilet d’or devant un étalon massif et cabré, il ne serait pas difficile de comprendre pourquoi quelqu’un pourrait penser qu’Orville Peck n’est qu’un provocateur, venu pour mettre à mal le monde de la country – l’un des genres musicaux les plus conservateurs et les plus provocants. En effet, il n’y aurait rien de mal à ce qu’il fasse exactement ça. C’est ce qu’a fait le rappeur Lil Nas X dont le « Old Town Road » est devenu l’un des plus grands titres de tous les temps.

Mais en écoutant la musique de Peck, il est clair qu’il ne joue pas seulement un jeu. Oui, il a ses hymnes enjoués à la Garth Brooks, mais il y a beaucoup de moments où la gaieté et la solitude se glissent dans ses paroles, tandis que sa musique prend un ton obsédant et mélancolique. Comme si un duo avec Shania Twain ne suffisait pas, l’apparition de son remuant « Dead of Night » dans la dernière sensation de HBO, la série Euphoria, semble destinée à attirer l’attention sur la musique de Peck, et ce au bon moment.

Bronco double presque la durée de sa production enregistrée à ce jour, et il en profite pour mettre en valeur tous les aspects de sa musique, de l’obsédant au carrément ringard. Cela en dit long sur l’état de la musique country à l’ère de Flordia Georgia Line que cet homme masqué dégage facilement plus de personnalité que 90% des stars modernes de la country. Il le fait en se délectant sans vergogne des tendances les plus ridicules et les plus campagnardes de la country hors-la-loi, remplie d’auteurs-compositeurs au cœur brisé qui se prenaient terriblement au sérieux.

La première chanson de Bronco, « Daytona Sand », se termine par un chant à la Bobbie Gentry, et l’album est rempli de percussions et de claquements de mains. L’album comporte également de nombreuses lignes où Peck – un Canadien – se moque gentiment de sa propre obsession pour l’Americana, comme le moment où il est dans un bar, parlant à une femme et « elle me dit qu’elle n’aime pas Elvis / Je dis, « Je veux un peu moins de conversation, s’il te plaît (she tells me she don’t like Elvis / I say, « I want a little less conversation, please).

Parfois, il est un peu trop direct, comme sur « Lafayette » où il déclare « Je me souviens de quelqu’un qui a dit qu’il n’y avait plus de cow-boys / eh bien, ils ne m’ont pas rencontré »(I recall somebody saying that there ain’t no cowboys left / well they ain’t met me), et quelques chansons sont presque indiscernables du genre de foire que vous entendriez sur les stations de radio de l’Alabama n’importe quel jour de la semaine. Mais ces moments occasionnels de cliché sont résolument corrigés par des morceaux comme « The Curse of the Blackened Eye », une histoire de relation abusive où Peck raconte que « j’étais assis l’année dernière en souhaitant tellement de fois que je meure » (I sat around last year wishing so many times that I would die). Le refrain le voit sortir un falsetto qui montre toute l’étendue de sa voix, et il craque aux bons endroits, capturant la même énergie onirique qui a fait de « Dead of Night » la bande-son parfaite pour les rendez-vous nocturnes d’Euphoria.

Le groupe de Peck sur ce disque est presque entièrement composé du groupe canadien de rock indépendant The Frigs, mais malgré leurs penchants habituels, ils font un travail magistral en recréant le son des années de gloire de la country, et fournissent le cadre parfait pour que Peck s’écarte des tempéraments habituels de ces chansons. Les banjos et la guitare slide de « Hexie Mountains » sont prêts pour la route, et « C’Mon Baby, Cry » ressemble à un classique instantané, demandant de la vulnérabilité et ramenant en quelque sorte Roy Orbison à la vie. C’est un son qui a fait ses preuves, mais la perspective de Peck est tout à fait fraîche, et suggère que peut-être tous les paillettes et le camp sont en fait juste Peck étant fidèle à lui-même.

***1/2

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