Blood Red Shoes est vraiment en forme en ce moment, réussissant à faire sonner son nouvel album, Ghosts On Tape, comme l’enfer à de nombreux endroits, mais aussi à faire sonner l’enfer comme un endroit hautement désirable ! Quand il ne sonne pas comme l’enfer, c’est comme si le paradis avait entendu parler des fêtes folles qui se déroulent dans le monde souterrain et avait décidé d’organiser la mère de toutes les raves euphoriques. On dirait que les deux cosmologies religieuses s’affrontent, avec un effet remarquable. Eh bien, laissez-nous vous expliquer. Un peu cela.
Dès le début, « Comply », avec son motif de piano dépouillé et obsédant et le chant plutôt torturé de Steven Ansell, vous vous rendez compte qu’il s’agit d’un album de Blood Red Shoes pas comme les autres. En effet, la narration – car Ghosts On Tape se rapproche certainement de l’album conceptuel – a été inspirée, selon le texte de présentation fourni : « des podcasts de crimes et de meurtres réels, de nombreuses chansons du disque sont racontées en tant que personnages et explorent la psyché sombre de ceux qui sont au sommet de l’exclusion ». Pas étonnant donc que ça sonne si sombre !
Cela ne veut pas dire qu’il n’est pas très amusant – la voix de Laura Mary Carter sur le brillant « Morbid Fascination » rappelle Kylie Minogue ou peut-être Alison Goldfrapp dans un sleazefest dancefloor (je dis cela de manière extrêmement positive), tandis que « Murder Me » fait un clin d’œil à PJ Harvey.
La pulsation de « Give Up » possède une forme, celle d’une chanson en deux parties – la voix urgente et furieuse d’Ansell fait sonner le morceau comme un croisement entre The Prodigy et Asian Dub Foundation pendant ses deux premières minutes. C’est la seconde moitié qui nous conduit à créer la sous-intrigue (probablement incorrecte) Paradis contre Enfer si on veut schématiser. Ce qui ressemble à un battement de cœur rapide séparant les deux parties, mène à une ascension euphorique, d’un autre monde, vers les nuages et au-delà. C’est totalement inattendu, et c’est quelque chose que l’on trouverait plus facilement sur un morceau de, disons, A Winged Victory For The Sullen par exemple.
« Sucker » a une accroche qui tue (sans mauvais jeu de mots) et incorpore des éléments de glam pour relever son aspect autrement troublant. Le résultat est assez beau et constitue un véritable point fort. I » Am Not You » arborera, lui, le genre de bord tordu que vous auriez trouvé sur le fabuleux album Violent Silences de Rico en 2004, alors que « Dig A Hole » est merveilleusement théâtral et dramatique, avant que le son glam ne soit revisité avec un effet splendide st dantesque sur « I Lose Whatever I Own » , grâce à son rythme similaire à celui de « Gold On The Ceiling » » des Black Keys.
Il n’y a pas de ratés ici, et pour clore Ghosts On Tape, « Four Two Seven » mous fera penser d’abord à Britt Ekland, qui frappait avec flirt sur le mur du pub dans The Wicker Man, puis aux débuts d’Ultravox. On adore, pour conclure, la variété des influences sur ce disque, qu’elles soient réelles ou simplement imaginées, mais, quoi qu’il en soit, une chose est sûre : Blood Red Shoes, quelque 17 ans après sa formation, vient de sortir le meilleur disque de toute sa carrière.
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