À la lumière du parcours iconique américain, les cow-boys sont peut-être l’archétype le plus emblématique – et le plus insaisissable. Dans la tradition musicale, l’importance et la diversité incroyables du mode de vie des cow-boys sont dépeintes par des artistes comme Marty Robbins (Big Iron), George Strait (The Cowboy Rides Away) et James Taylor (Sweet Baby James). Aujourd’hui, avec The Ballad of Dood & Juanita, Sturgill Simpson y ajoute une nouvelle pierre.
Dans une récente interview, le magazinne Rolling Stone avait dépeint le Simpson contemporain comme une qu’elqun doté d’« identité indéniablement forte » un travailleur acharné et historique avec un côté rebelle. Sur Dood & Juanita, un album conceptuel censé être son dernier, Simpson fait porter des bottes similaires à son héros porteur de fusil et au reste de la distribution du conte. Grâce à une solide musicalité et à un contrôle de la narration, Simpson suscite l’investissement émotionnel et la connexion de ses auditeurs tout au long des 10 titres de l’album.
Le prologue du disque est une marche, semblable aux airs des corps de tambours de la guerre civile, qui place les auditeurs dans les collines du Kentucky en 1868. Les auditeurs entendent le cadre et l’intrigue et, comme dans la plupart des westerns, l’auteur va droit au but : il s’agit d’une histoire d’amour mettant en scène deux pionniers appalachiens mythiquement destinés et plus grands que nature.
Dood est le premier à faire l’objet d’une attention particulière, à la manière d’un conte de fées légendaire : il est le fils d’un mineur de montagne/ et d’une jeune fille Shawnee. Tout au long du premier morceau complet de l’album, Simpson et son groupe montrent leurs talents ; dès le début, l’introduction de guitare, violon et harmonica entraînés peint le héros sous un jour complexe. Lorsque la chanson commence à s’accélérer et à battre son plein près du refrain, les auditeurs se sentiront justifiés de considérer cette nouvelle version de l’histoire classique de l’Ouest sauvage. Pecos Bill tremblerait dans ses éperons en entendant parler d’une telle légende.
« One in the Saddle, One on the Ground », ballade amoureuse de Juanita, l’amante de Dood, est une chanson exemplaire de la prairie. Sur fond de banjo ralenti et d’harmonica surchargé, Simpson complique son histoire en révélant que Juanita a été faite prisonnière par des bandits. La chanson va de l’avant avec des vibrations typiques de l’action montante. Enfin, on fait connaissance avec les compagnons de Dood, son destrier Shamrock et son chien Sam, qui reçoivent tous deux leur dû dans leurs morceaux respectifs. Par exemple, dans « Shamrock », certains des choix musicaux les plus intéressants de l’album s’alignent sur l’amitié de Dood pour son cheval : les castagnettes claquent comme des battements de sabots rapides, tandis que la guimbarde et les brosses rapides de la caisse claire complètent les rythmes lyriques légers dans des lignes comme « Sure-footted as a billy goat/ With thirty-three-inch ears/ Clog dance on a snake with his front two feet/ And give the coyotes the rear » (un pied sûr comme un bouc/ avec des oreilles de 30 pouces/ il danse sur un serpent avec ses deux pieds avant/ et laisse les coyotes à l’arrière). Un beau solo en flat-picked laisse la place au reste du groupe, qui s’emploie à rendre facile l’échange de huit.
Sur « Played Out », Simpson est confronté à un autre dilemme classique du cow-boy : que doit faire notre héros lorsqu’il n’a nulle part où aller, lorsqu’il a des trous dans sa peau de daim et « une sensation de morsure qui commence à ronger » ? Eh bien, il doit enterrer son chien mort et aller de l’avant. L’imagerie de cette chanson est remarquable à travers la description par Dood du carnage physique exercé sur son corps et de celui de ses compagnons. Les thèmes de la solitude et de la douleur dans la chanson frappent profondément par le travail des effets de feu de camp, la conversation familière entre le banjo et le violon, et un écho expansif à la fin de chaque ligne. L’acte final d’enterrer son chien Sam semble métaphorique et encourage Dood dans sa quête de vengeance.
Si le morceau suivant, intitulé « Sam », fait un merveilleux travail de caractérisation et d’harmonies spirituelles, il amorce aussi un tournant introspectif dans l’album – un tournant qui s’éloigne de l’apothéose pour aboutir à une résolution pour le héros. L’avant-dernier morceau de l’album, intitulé « Juanita », est une magnifique chanson d’amour aux tons chauds du Sud-Ouest américain, d’où est originaire la captive Juanita. Avec un balancement et une démarche accompagnés de castagnettes et de guitare espagnole, Simpson chantonne des paroles comme « You are an ocean/ I am a grain of sand » (tu es un océan/je suis un grain de sable) pour montrer la dévotion de son héros à sa cause. L’interlude de « Juanita » consiste en des phrases délicates de la section des cordes, de l’harmonica et de la guitare.
Sur « Go in Peace », les auditeurs sautilleront en même temps que le banjo qui tourne, la marche de la basse qui voyage et cette fidèle guimbarde. C’est une chanson d’allégresse qui s’inscrit certainement plus dans la tradition bluegrass que le morceau conclusif « Ol’ Dood (Part II) ». Dans ce dernier morceau de l’album, Simpson revient à l’arrangement original de « Ol’ Dood (Part I) », bouclant la boucle en expliquant comment Dood a sauvé Juanita de son ravisseur Seamus – allant même jusqu’à suivre le coup de fusil qui scelle l’affaire.
L’album The Ballad of Dood & Juanita de Sturgill Simpson témoigne de la virtuosité et de l’authenticité esthétique de l’artiste de multiples façons, notamment par l’attention minutieuse qu’il porte aux détails lyriques et compositionnels. Alors que son cow-boy s’en va au soleil couchant et que Sturgill Simpson se prépare à jouer un rôle important à l’écran, il doit rêver profondément à sa prochaine aventure musicale.
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