D’après ce que nous savons, le post-metal est un genre qui peut, soit vous bercer dans un sentiment de sécurité, soit vous étriper si fort que vous vous demandez qui a fait du mal aux personnes qui font de la musique dans ce genre. Mon expérience du post-métal a été très minime, et cela peut être attribué à deux groupes situés à l’opposé du spectre : Cult of Luna et Kontinuum. Cependant, après avoir regardé Roadburn Redux cette année, on peut se demander si notre éducation musicale n’avait pas besoin d’être élargie une fois de plus ; après tout, plus jontinuait à regarder plusieurs sets pendant ces deux jours environ, plus on était étonné et fasciné par la façon dont les groupes semblaient repousser les limites de leur propre créativité pour jouer leurs sets. C’est au cours de cette rafale d’événements que, en parcourant la majorité de la liste de Pelagic Presents, on a rencontré un groupe qui a tiré le tapis sous nos pieds et nous a fait croire que, peut-être, le post-métal avait quelque chose d’avant-gardiste après tout. Préparez-vous à vous élever et à passer dans l’éternité, car c’est ce que Year of No Light veut faire sur son dernier album, Consolamentum.
Pour les non-initiés, un consolamentum était un processus du catharisme dans lequel une personne qui voulait monter au ciel était « consolée » » car ils croyaient que vivre mène au « regret » et qu’ils avaient besoin d’être consolés afin d’être absous tout en gagnant simultanément une régénération spirituelle, le pouvoir de prêcher, et l’élévation à un plan supérieur. Une fois la personne consolée, elle devenait un parfait cathare et devait consacrer sa vie à être missionnaire. Considéré comme hérétique par les catholiques, le catharisme a fini par être éradiqué en 1350 grâce à l’Inquisition médiévale. Pour un terme qui a été rendu « sans signification » par la doctrine religieuse catholique actuelle – étant donné que la plupart des informations que nous connaissons sur les Cathares proviennent du catholicisme – Year of No Light redonne du sens à ce mot en présentant essentiellement à l’auditeur quelque chose qui peut s’apparenter à trouver son salut, d’une manière plutôt sinistre.
Consolamentum est lourd – il y a tellement de tension et de poids dans leur musique qu’elle peut sembler oppressante, surtout lorsque les influences du sludge commencent à vous creuser la peau. Il y a quelque chose dans cette musique qui s’insinue lentement en vous, vous enfonçant de plus en plus dans un miasme de malaise et d’effroi. Il est vrai que cela n’aide pas que l’atmosphère soit épaisse, créée par ce qui ressemble à des tambours dissonants et une guitare cacophonique qui vous fait vraiment tourner la tête. Year of No Light voulait vraiment que l’auditeur ait l’impression d’avoir atteint son salut, et il est clair que le chemin vers le salut est difficile, rempli de paysages sonores infernaux et d’une myriade d’autres bruits qui font que même le cœur de l’auditeur le plus endurci se serre à l’estomac. S ion a déjà eu des réactions viscérales à des albums de cette nature – on pense par exemple à Vide d’Emptiness – Consolamentum est un album qui nous a donné envie de nous éloigner, mais qui nous a maintenus à l’écoute aussi longtemps qu’on a pu le faire. On est ainsi assez curieux pour suivre ses pistes sonores, d’autant plus que la musique oscille et s’enfle d’une manière qui peut sembler formelle, mais qui ne l’est pas. La musique change constamment, et il faut être sur ses gardes lorsque cela se produit, car son humeur et son atmosphère changent en même temps. Ce n’est donc clairement pas le post-métal originel.
Dans l’ensemble, Consolamentum est un album rempli à ras bord de symboles religieux, d’atmosphères épaisses et d’une myriade d’influences qui élargissent l’étiquette post-métal. Alors que cet album aurait pu fournir un seul morceau sinistre, il en fournit cinq, chacun avec son propre caractère et sa propre nuance. Il est clair que Year of No Light a pris son temps pour créer cet album et cela se voit – leur hiatus de huit ans valait bien la qualité de cet album. On est ainsi profondément enchanté par cet album ; aucun mot ne pourra, d’ailleurs, lui rendre justice ; et, cet égard, nous avons atteint le tiercé de l’étrange avec Vide d’Emptiness, De Doorn d’Amenra et cet album.
****