Desperat Journalist: « Maximum Sorrow ! »

Si Desperate Journalist a évolué au cours de sa presque décennie d’existence, il n’a jamais sacrifié la catharsis et l’écriture de chansons saisissantes qui sont élevées sur leur stupéfiant quatrième album, Maximum Sorrow !.

Depuis leur formation en 2012 sous le nom de Desperate Journalist, Jo Bevan, Rob Hardy, Simon Drowner et Caroline Helbert ont créé une musique cathartique impressionnante. Tant sur leur premier album éponyme de 2014 que sur leur deuxième album, Grow Up, ils n’ont rien retenu de leur post-punk infusé de gothique. Leur élan vers l’avant s’est poursuivi alors qu’ils se dirigeaient vers la trentaine. In Search of the Miraculous les a vus intégrer des éléments shoegaze qui ont infusé de la luminosité dans leurs tonalités plus sombres. Cependant, ils n’ont jamais sacrifié l’essence de ce qui rend leur musique unique : la catharsis et l’écriture de chansons captivantes. Ces deux éléments sont mis en valeur sur leur nouvel opus, l’époustouflant, Maximum Sorrow !

Le quatrième album du groupe londonien est un témoignage du courage des femmes, raconté à travers un prisme qui passe de la mélancolie gothique au post-punk fiévreux. Le premier morceau, « Formaldehyde », surprend par son ton langoureux, la voix de Bevan devenant angélique sur une progression de tonalités sombres. « Quand tu seras parti, qui se souviendra de toi ? » (When you are gone, who will remember you?) demande-t-elle au protagoniste de la chanson. Une douleur persistante se fait entendre dans sa voix, comme si elle avait été laissée seule à souffrir.

Des endroits où elle a vécu aux personnes qui ont fait partie de sa vie, la misère entoure l’héroïne. Sur la dissonance sombre mais rugissante de « Fault », qui fait écho à un jeune U2 affamé, Bevan raconte un appartement crasseux qu’elle a occupé. Sa résidence et son quartier étaient remplis d’un désespoir qu’elle respirait chaque jour :

« Et ces complexes d’adolescents sont difficiles à battre/ Quand votre placard est rempli de défaites, de défaites, de défaites, de défaites ! / Ce n’est la faute de personne / Alors c’est la faute de tout le monde » (And those teenage hangups are hard to beat/ When your closet is piled up with defeat, defeat, defeat, defeat! / It’s no one’s fault / Then it’s everyone’s fault).

Sur le saisissant « Personality Girlfriend », le groupe adopte une approche grand écran qui fait écho à Pat Benatar à ses débuts. C’est un morceau austère mais passionnant, avec des rythmes lourds qui contrastent avec la guitare brûlante. Pendant tout ce temps, l’approche de Bevan passe de l’attrait à l’urgence. Si la chanson peut sembler être un appel à l’amour, notamment lorsqu’elle répète « Please will you love me », elle est bien plus que cela. Lorsque sa voix devient impassible, elle livre une critique mordante de la société et de la façon dont elle traite les femmes. Ce monde a condamné notre héroïne à une vie de solitude.

Même parmi ses proches, l’angoisse existe. « Fine in the Family » est porté par la guitare électrisante de Hardy et présente des variations dynamiques allant du shoegaze au power rock explosif. Ces changements capturent la déception de ne pas être à la hauteur des attentes des parents. Ou est-ce l’hymne du mouton noir de la famille ? Sur le morceau gothique-pop « The Victim », Bevan chante une personne qui a toujours joué le rôle de victime. Guidée par la basse tendue de Drowner, elle demande : « Un autre appel à propos d’un casting, qui laisserez-vous entrer ? » (Another casting call, who will you let inside?) . Pendant ce temps, l’étourdissant « What You’re Scared Of ? » est une ode à l’innocence perdue à jamais. C’est le coucher de soleil final livré de manière écrasante alors que ses tonalités évoluent de la tranquillité au tonnerre.

Toutes les chansons de Maximum Sorrow ! gravitent autour de sa pièce maîtresse, « Everything You Wanted ».  Ce chef-d’œuvre épique est l’élévation de Desperate Journalist à la perfection. C’est un mélange de l’éclat gothique de The Cure, du disco-punk exaltant de Blondie et des crochets hyméniques de Wolf Alice, enveloppé dans un linceul de noirceur inéluctable. Chaque mot prononcé par Bevan est dévorant, car elle chante notre quête collective de sens et de but. Au cœur de son récit se trouve l’artiste et interprète Kevin Bewersdorf, qui est passé de la promotion de sa marque Maximum Sorrow à l’effacement de sa présence en ligne. Mais il n’est pas le seul à réaliser que « vous ne serez jamais tout ce que vous vouliez » (you’ll never be everything you wanted) tout en essayant de combler « le vide où vous êtes né » (the emptiness you were born).

Cette quête sans fin de sens est juxtaposée dans et entre « Armageddon » et « Utopia ». La percussion d’Helbert crée l’urgence saisissante dans le premier moment du morceau. « Armageddon » s’ouvre ensuite sur la guitare d’Hardy, qui se mêle à un synthé scintillant. Un optimisme inattendu se dégage du morceau, y compris de la voix de Bevan qui chante « Armageddon is coming / So near ». Elle compte les jours comme l’héroïne qui anticipe le début de sa seconde vie. Ou peut-être se réjouit-elle de la fin des temps, telle qu’elle est décrite dans les derniers instants de la chanson ?

« Utopia » possède un caractère austère et hymnique qui tient à la fois de la renaissance et des derniers sacrements. « Bourré comme d’habitude / As-tu trouvé quelque chose de beau ? / Is this utopia ? » (Drunk as usual / Did you find something beautiful? / Is this utopia ?), chante Bevan dans une atmosphère de synthétiseur. La souffrance a pris fin, mais un nouveau voyage a commencé. Que ce soit ici ou dans une autre vie reste un mystère, mais l’esprit de notre héroïne vit toujours.

Il vit au sein de Jo Bevan (voix), Rob Hardy (guitare), Simon Drowner (basse) et Caroline Helbert (batterie). À l’instar des femmes auxquelles il rend hommage, Maximum Sorrow ! est un témoignage de la force du groupe et de sa quête sans fin de pertinence. Desperate Journalist a créé un autre album remarquable qui captive du début à la fin.

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