Vous avez déjà mis un nouvel album sur votre platine et au milieu de la première piste, vous êtes prêt à acheter tout le catalogue de l’artiste ? C’est ce que peut inspirer l’écoute de Mana de Gianluca Becuzzi. Basé à Rome et actif depuis les années 1980, Becuzzi s’inspire d’une grande variété de styles, dont l’électroacoustique, le drone, l’industriel, l’ambient et l’art sonore, mais son approche est distincte et singulière.
Becuzzi joue de la guitare et de la basse, et incorpore des échantillons et de la programmation dans le mélange. Cristiano Bocci joue de la contrebasse sur deux morceaux.
La première chose que l’on remarque dans Mana, ce sont les accords de guitare surchargés. Néanmoins, Becuzzi module ces riffs massifs avec des percussions et des échantillons d’instruments acoustiques ainsi que des sons aux sources moins identifiables. Vous entendrez donc des cordes, des bois, des synthés et des tambours… ou du moins quelque chose qui ressemble à ces instruments. D’autres samples sont plus ésotériques ou abstraits, notamment des bruits sculptés, des chants de moines tibétains et des sons de la nature. Certains morceaux ont une allure décousue, passant d’une palette à l’autre, mais Becuzzi parvient à les faire fonctionner.
En ce qui concerne l’ambiance, elle est sombre et dérangeante. Becuzzi incorpore souvent la dissonance, en explorant les motifs de battement entre deux notes ou par le biais de la distorsion électronique. Le résultat est inquiétant et obsédant, même si son jeu de guitare apporte des niveaux d’énergie élevés. Les percussions sont souvent de nature martiale, ce qui correspond au ton inquiétant de l’album.
Mana est une version 2CD, avec plus de 90 minutes de musique. C’est ce que l’on obtiendrait si une chimère génétique Dead Can Dance / Sunn O))) allait en enfer, collaborait avec Stockhausen, et revenait un ordre de grandeur encore meilleur. Bravo et doigts lévés pour manifester son appréciation.
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