Lesley Barth: « Big Time Baby »

Au milieu de la première face de Big Time Baby, nous sommes confrontés à une sorte de parabole. Elle prend la forme de « Nashville », l’une des chansons les plus fortes du nouveau disque de Lesley Barth. La chanson raconte l’histoire, teintée de country-western, d’un musicien de studio de Nashville qui s’installe à New York, essayant de s’intégrer mais dont les « Thank you, ma’am » et les bottes à embout d’acier le trahissent toujours. On a beau essayer de fuir son passé, on ne peut jamais vraiment fuir les parties de celui-ci qui se cachent en nous. 

C’est un moment important de l’excellent deuxième album de Barth, non seulement parce que c’est une distillation de quatre minutes de l’excellence de l’album, mais aussi parce que son histoire est celle de Big Time Baby. Non, ce n’est pas une autobiographie, mais plutôt un guide de style sonore – les chansons de Barth sur Big Time Baby passent de l’alt-country au disco, du blues à l’indie-rock, de Nashville à New York. Elles mélangent l’ancien et le nouveau avec l’aisance de Kacey Musgraves et de Jenny Lewis. Big Time Baby a un charme nostalgique, mais il n’utilise jamais la nostalgie comme un opioïde ; au contraire, il transforme cette nostalgie en quelque chose de personnel et de profond, la voix de Barth elle-même.

Plus que les sons de « Nashville », la chanson aide à encadrer les thèmes du reste de l’album. « Ce que j’ai appris en écrivant cet album, c’est qu’on ne peut pas jouer sa vie et vivre sa vie en même temps », dit Barth à propos de Big Time Baby. C’est un disque de déguisements, de fuites de vies passées, de moments où l’on cesse de reconnaître son propre reflet. « Qui est la femme qui regarde en arrière la femme qui me regarde en arrière ? » ( ho is the woman looking back at the woman looking back at me ?) chante Barth sur le premier « single » de l’album. Aussi forte que soit sa voix musicale sur Big Time Baby, le disque reconnaît que son individualité n’est pas un phénomène sans effort. Cela demande du travail, et il faut souvent se tromper pour trouver la voie à suivre.

Heureusement pour nous, Barth a trouvé ce chemin et l’a suivi à toute allure pour réaliser Big Time Baby, un testament de son écriture et de son art. Le titre de l’album provient du morceau d’ouverture, « Lower East Side ». Sans contexte, il se lit comme un mème, une auto-dépréciation insolente. Dans la chanson, cependant, Barth ajoute de la dimension aux mots : eJe ne suis pas prête » pour le grand moment, bébé. C’est toujours de l’autodérision, mais beaucoup plus productif. Combien de fois nous nous sentons tous pareils : atteints du syndrome de l’imposteur, pas prêts à sortir de notre zone de confort ?

Heureusement, Barth ne pourrait pas se tromper davantage dans l’estimation qu’elle fait d’elle-même. Big Time Baby – avec tout son charme et son raffinement – prouve qu’elle est plus que prête pour le grand moment. C’est le son d’une voix en pleine ascension, une étoile qui naît d’une supernova.

***1/2

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