Connan Mockasin: « Jassbusters Two »

S’ouvrant sur ce qui rappelle la berceuse obsédante de Rosemary’s Baby se transformant en un hurlement spectral à la Alice Coltrane, Jassbusters Two de Connan Mockasin s’engage immédiatement sur une trajectoire émouvante et drôle. Conçu comme un groupe de professeurs d’école s’unissant pour créer ostensiblement des chansons plus traditionnelles, l’échafaudage entier de cet album vaguement conceptuel est une chute. Mais tout comme les excès ridicules du Carnaval font allusion à une réalité plus profonde de désintégration des contraintes sociales normatives, cette œuvre s’attaque à la nature même de ce que signifie un album.

Dire que cet album fonctionne comme une déconstruction est quelque peu erroné (il y a beaucoup de Faust dans cet album), mais il bouleverse une convention de toutes les manières possibles. Prenez par exemple l’instrumental rhapsodique « K is for Klassical », où après un séjour nocturne de guitares délicates surmontant une basse propulsive venant du centre de la terre, nous obtenons un « ehn ! » grincheux et insatisfait comme seul son vocal et final. C’est comique. C’est aussi, d’une certaine manière, une parodie de démystification. Si l’ensemble du gimmick est un acte, il devient compliqué pour le gimmick lui-même d’attirer l’attention sur son propre artifice.

Nous nous retrouvons ainsi au point de départ, avec un groupe d’instituteurs qui essaient de faire du rock and roll et qui, au lieu de cela, lancent des interrogations cosmiques dans l’éther. Les rires que nous entendons en arrière-plan de « Flipping Poles » est-il une relique authentique du groupe de Mockasin en train de faire quelque chose ensemble, ou bien le rire vient-il de l’intérieur du personnage des instituteurs ? Cette distinction est-elle aussi importante si nous avons tous entendu le rire sur le morceau ?

Jassbusters Two est bien plus que le simple dispositif de cadrage qui le sous-tend. S’enroulant autour de guitares surf, de vocalisations pour la plupart incompréhensibles, de grooves langoureux et de chagrins d’amour gérés de façon fantaisiste, l’album est le son d’une quête de forme. Que la forme ne puisse être donnée que rétrospectivement, une fois que les choses se sont ossifiées dans leurs formes définitives, rendant ainsi la recherche incohérente dans le présent, c’est l’une des meilleures blagues jamais entendues depuis longtemps.

****1/2

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