À la première écoute du « debut » album de Sparkle Division, To Feel Embraced, cette fusion poussiéreuse de jazz lounge et de rythmes somnolents, on ne penserait pas immédiatement qu’il s’agit d’un projet de William Basinski, mais c’est bien lui qui est à la barre – même si c’est autant la sortie de Preston Wendel, assistant de studio, que son propre travail qui a inspiré Basinski. Il a sorti son saxophone pour un grand nombre de morceaux et cette fumée qui monte en crescendo est une véritable révélation. Avec les chanteurs invités, les touches poussiéreuses des boucles et les titres hilarants des chansons, c’est une écoute divertissante et parfois désorientante. La houle des cuivres de l’ouverture « You Go, Girl ! », avec son tuba en arrière plan, semble un peu en contradiction avec le titre. Les cordes qui grondent font penser à une extravagance de film de James Bond, mais cela ne dure que deux minutes, et ensuite nous avons du xylophone et des drones inquiétants avec des rythmes énormes et paresseux et un saxophone vraiment sordide. L’association des deux donne une sorte d’allure trip hop, mais c’est bien plus que cela. Le klaxon souffle sauvagement à certains moments, essayant de mettre le beat hors de son pas implacable, mais il n’y parvient pas. C’est une ouverture juteuse et groovy qui ne fait que se poursuivre dans le bon sens.
Les cordes ensoleillées de la Riviera et les vibes glissando de « For Gato » nous éclairent à travers les palmiers. Son rythme est moderne, orienté vers le dancefloor, et le saxo est plus endormi ici, mais il sort un peu des sentiers battus quand on ne s’y attend pas. Les boucles de bande magnétique, qui sont en quelque sorte synonymes de Basinski, sont toujours présentes sur To Feel Embraced, mais de façon beaucoup plus atténuée, comme faisant partie de l’ambiance générale, donnant l’impression que tout cela a été enregistré pour être lu sur 78 tours, le son de la poussière dans les sillons accompagnant certains passages.
En fait, le rythme poussiéreux et la boucle de piano de « Oh Henry ! », qui fait appel à la contrebasse de Henry Grimes, se transforme finalement en une escapade animée qui rappelle Roni Size, tandis que la poussière saupoudrée dans les sillons de « To The Stars Major Tom »ressemble davantage à de la poussière endormie. Il s’agit d’une vignette romantique et rêveuse, la bande-son d’une promenade matinale sur la plage au lendemain de la nuit précédente ; mais comme beaucoup de ces morceaux, il y a un hic. Mais comme beaucoup de ces morceaux, il y a un hic. Il s’engouffre dans le morceau suivant sur une vague de saxo criard et de rythme hip-hop traînant. Il pourrait s’agir d’une bande originale, mais pour quoi faire ?
L’album évolue de cette manière, passant d’une atmosphère à l’autre, entraînant souvent le même morceau avec lui. Il y a une énergie diffuse de This Mortal Coil dans la rêverie à la flûte de Pan sur « To Feel » et « Slappin’ Yo Face » est un court travail de jazz qui dérive dans et hors de phase, tandis que « Queenie Got Here Blues » est un court scat pour la vieille amie de Basinski, Leonora Russo, qui sonne comme un enregistrement des années 40. Leur volonté de saupoudrer les morceaux d’éléments magiques pour les déformer ou désorienter l’auditeur est tout à leur honneur.
To Feel Embraced n’est pas toujours cohérent, mais c’est en partie l’inattendu qui permet de rester concentré. Il y a des parallèles avec le dernier album de Low dans la façon dont un son parfaitement beau peut recevoir une couche de quelque chose ou un courant sous-jacent d’un autre qui le sort de l’ordinaire. C’est une écoute soul, jazzy, volontaire et poussiéreuse qui fait honneur à toutes les personnes concernées.
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