The Ophelias, un quatuor folk/rock indé qui a vu le jour à Cincinnati, reviennent avec un troisième album studio, Crocus. Si les quatre membres se sont réunis après avoir joué le rôle de la « fille de service » dans un groupe d’hommes, leur collaboration s’est développée à partir de leur créativité combinée, marquée par la voix unique du guitariste et auteur-compositeur-interprète Spencer Peppet et le violon d’Andrea Gutman Fuentes. Avec la section rythmique actuelle, la bassiste Jo Shaffer et Mic Adams (qui a fait une transition masculine depuis le dernier album, Almost de 2018), The Ophelias apporte une touche de folk expérimental et d’orchestre de chambre qui convient aux paroles et au chant expansifs et expérimentaux de Peppet.
Le sentiment d’une communauté collaborative coule à travers les 12 pistes de l’album, le plus remarquable étant peut-être « Neil Young on High », un duo de Peppet avec Julien Baker, connu à la fois pour son travail solo et aux côtés de Phoebe Bridgers et Lucy Dacas dans le groupe boygenius. Dans le début de « Vapor », où l’on sent le banjo, et dans l’ambiance dancehall des Appalaches de « Spitting Image » » on entend les racines du groupe dans le Midwest, mais l’ambiance à la Velvet Underground de « Spirit Sent » se fond dans un folk baroque orchestré qui révèle l’étendue des influences musicales de ce groupe.
Sur le plan lyrique, Peppet a tendance à évoquer de manière rêveuse des événements passés, en tenant compte de leurs répercussions émotionnelles sur le présent, comme dans le titre d’ouverture, qui évoque une relation qui s’est terminée sans grande clarté, mais qui a laissé une trace, de sorte que Peppet espère qu’on se souviendra d’elle en chantant « I hope that you are happier now but I hope that you dream of me » (J’espère que tu es heureux maintenant mais j’espère aussi que tu rêves de moi). De nombreuses références suggèrent un passé religieux difficile, comme « Sacrificial Lamb », « Biblical Names » où elle doit « appeler des conneries » (to call bullshi), et « Becoming a Nun » », où elle chante « Je suis ce que la Bible considère comme la pire sorte de femme » (I am what the Bible agrees is the worst kind of woman). Ailleurs, l’amour ressemblera à The Twilight Zone », où l’on « partirait si je pouvais/Mais je suis là si tu veux et j’aimerais te voir » (would leave if I could/But I’m here if you want and I’d love to see you).
La musicalité du groupe est riche, car il crée des ambiances variées, souvent agrémentées de cordes et de cuivres supplémentaires, créant des ruminations texturées sur les structures de base des chansons folk rock. Sur Crocus, The Ophelias traversent une variété de transitions émotionnelles et musicales, rendues plus gérables et même divertissantes grâce à l’effort commun du groupe pour apporter vitalité et profondeur à ces chansons. Comme ils le chantent dans « Vices », le morceau de clôture de l’album : « Peint comme une image/beaucoup trop honnête/je peux sentir ton cœur se briser » (Painted like a picture/Looking much too honest/I can feel your heart split), The Ophelias, comme beaucoup de grands auteurs-compositeurs, parviennent à transformer un chagrin d’amour en une musique souvent belle, et ce n’est pas un mince exploit.
***1/2