En regardant les résultats des élections de 2020, Jason Isbell ne pouvait pas croire que la Géorgie était devenue un État bleu. Avec son combo 400 Unit, il a souhaité rendre honneur à ces résultats au moyen d’un album de reprises, Georgia Blue. Son groupe, ainsi qu’un casting de personnages comprenant Chris Thile, Bela Fleck, Julien Baker et John Paul White, et des airs de R.E.M., James Brown et Gladys Knight ont ainsi fait part de cette expérience de découverte de la variété des musiques originaires des pins de Géorgie.
Thile et Fleck commencent par une interprétation de « Nightswimming » qui met en valeur les sonorités acoustiques du duo, sans oublier le travail à la six cordes d’Isbell. C’est une ouverture tranquille qui joue sur les forces des deux invités et met en valeur les paroles de Michael Stipe. Le ton change immédiatement avec Sadler Vaden, du 400 Unit, qui se met en avant sur la chanson « Honeysuckle Blue » de son ancien groupe, Drivin’ and Cryin. Les guitares jumelles et la basse font ressortir le caractère brutal de la chanson.
N’ayant jamais peur de jouer à contre-courant, Isbell fait appel à Brittney Spencer pour chanter « It’s A Man’s World » de James Brown, et sa voix fournit la puissance nécessaire pour porter le morceau à de nouveaux sommets. Sa lecture donne à la chanson un côté bluesy tandis que le travail d’Isbell brûle avec un feu qui ne peut être éteint. Alors que Spencer peut sembler hors de propos au début, elle finit par vous convaincre par son intensité.
La star suivante sera Amanda Shires, dont le violon et la voix transforment le titre « Cross Bones Style » de Cat Powers en une chanson qui saute aux yeux. Le violon hurle et gémit, tandis que le groupe se détend suffisamment pour donner un sentiment d’obscurité et de danger. Shires a les capacités vocales de Chan Marshall, mais il y a aussi un soupçon de Dolly Parton dans sa voix.
Isbell prend le micro pour une interprétation du classique d’Otis Redding, « I’ve Been Loving You Too Long ». Il la joue assez directement, mais personne n’a vraiment la puissance vocale pour suivre Redding. Mais le jeu de fret d’Isbell compense en remplaçant les cartes de cuivres par des guitares, ce qui donne une atmosphère inspirée, semblable à celle de l’original. Moins délicate est la chomposition « Sometimes Salvation » des Black Crowes, taillée sur mesure pour le 400 Unit. La voix de Steve Gorman est convaincante, tandis que le groupe brûle. Brandi Carlile et Julien Baker atteignent toutes les bonnes notes sur leur reprise de « Kid Fears » des Indigo Girls, tandis que Spencer revient avec John Paul White pour baisser le son sur « Midnight Train to Georgia ».
C’est autre chose que de reprendre les Allman Brothers, et une autre de s’attaquer à « In Memory of Elizabeth Reed ». Commençant lentement, principalement avec des accords de bloc, les choses commencent à s’installer et à générer de la vapeur. Avec le travail de Peter Levin à la B3, leur lecture est presque aussi longue que la version des Allman, et à la fin de l’instrumental, ils ont presque atteint leur intensité. Presque.
La collection se termine par une autre reprise de R.E.M., « Driver 8 », avec John Paul White dans le fauteuil du chef d’orchestre. La dynamique se concentre davantage sur le piano, avec des guitares acoustiques encadrant la scène. Il manque un peu de la magie que Berry, Buck, Mills et Stipe ont générée, et l’album ne se termine pas exactement sur un sommet musical. L’importance de ce point n’a pas vraiment d’importance puisque l’argent généré par cette collection sera reversé à des associations à but non lucratif basées en Géorgie.
Le plus important est peut-être le fait que Jason Isbell et les 400 Unit parviennent à mettre en valeur une partie de la musique qui rend l’État de Géorgie si singulier. Les habitants de la Géorgie ont pris position pour faire de cette nation un endroit plus équitable pour tous, faisant de Georgia Blue un opus vraiment unique.
***1/2