Le titre du premier album de Squirrel Flower, I Was Born Swimming, fait référence à sa naissance difficile, sortant de l’utérus en flottant dans le liquide amniotique. Alors que ce premier opus représentait une naissance, une auteure-compositrice en mouvement constant pour trouver sa place dans le monde, le deuxième effort de la chanteuse et auteure-compositrice Ella Williams est plutôt une renaissance dans le feu. En portant sa vision à l’échelle planétaire, Williams a écrit une « lettre d’amour au désastre » avec Planet (i).
Le titre fait soi-disant référence à la prochaine planète que l’humanité va revendiquer et, très probablement, détruire à nouveau. Comme il se doit, la destruction est omniprésente sur l’album. Dans « Deluge In The South », Williams est « coincé » dans une mousseline de soie brillante » (stuck in chiffon shining), regardant un paysage inondé, tandis que « Big Beast » envoie l’auditeur directement dans la trajectoire de la tempête avec son point culminant apocalyptique et sauvage. Pourtant, les désastres de Williams ne sont pas toujours d’une ampleur aussi biblique. Dans « Hurt a Fly », Williams se place dans la peau d’un narcissique qui s’en prend à ceux qui l’entourent, puis insiste : « Tu sais que je ne pourrais jamais faire de mal à une mouche, à moins que cela ne me fasse perdre mon temps » (You know I could never hurt a fly/Unless it wasted my time).
Williams ne fait pas que constater la destruction, elle la célèbre et l’accueille. Elle se tient sur le toit et accueille les vents arides d’une tornade sur « Desert Wildflowers » et elle supplie de vivre seule et invisible sur « To Be Forgotten ». Mais surtout, l’ouverture elle-même accueille la destruction. « I’ll Go Running » commence dans un élan de colère, mais ne se termine pas dans le désespoir, mais dans le triomphe. Williams trouve sa renaissance dans les feux du désastre alors qu’elle insiste : « Je serai plus neuve qu’avant/Je serai quelque chose que vous n’avez jamais vu » (’ll be newer than before/I’ll be something you’ve never seen).
Comme il se doit, Williams semble plus neuve qu’avant sur son deuxième album. Dès le début, les « singles » de l’album semblent avoir ouvert la voie à un son légèrement plus défini pour Williams sur Planet (i). La construction flottante et céleste de ses débuts fait place à des moments plus poussiéreux et terreux, alors que le rock indépendant dense et distordu peuple les pièces maîtresses de l’album. Des guitares bruyantes mènent à un point culminant explosif sur « I’ll Go Running », tandis que des solos de guitare nerveux sur « Hurt a Fly » et « Flames and Flat Tires » ponctuent l’album de moments dramatiques.
Pourtant, comme dans I Was Born Swimming, la musique de Williams excelle une fois de plus dans les petits détails. La texture et l’atmosphère régissent son monde plus que les accroches qui chatouilleraient l’oreille. En dehors des moments de solos noueux et des distorsions occasionnelles, Williams invite votre attention plus qu’elle ne l’exige. Mais lorsque cette attention est accordée, de nouvelles profondeurs dans son écriture se révèlent. La poésie gracieuse de Williams porte des morceaux denses et verbeux comme « Pass » ou le plaintif et clairsemé « Desert Wildflowers », offrant un répit aux paysages sonores arides et apocalyptiques de l’album avec une intimité accueillante.
C’est surtout dans ces moments austères que les forces de Williams en tant qu’interprète s’avèrent être la pièce maîtresse indéniable de l’album. Sa voix puissante atteint des sommets sur le morceau central grunge « Roadkill » et explore un territoire feutré et éthéré sur le morceau final « Starshine ». Invariablement, Williams est magnétique des premiers instants jusqu’à la fin. Quand elle chante sur « Iowa 146″ » quand elle joue de la guitare, tout s’écroule. Elle vous plonge dans des histoires de désastre, des rêveries nostalgiques, des moments de joie volés et la douleur ardente de la renaissance. Jusqu’à la fin du disque, vous êtes maintenant sur la planète d’Ella William.
***1/2