Connue à l’origine pour son travail au sein d’Arcade Fire, les projets solo de Sarah Neufeld reflètent constamment le talent divers et obscur qu’elle dégage en tant que multi-instrumentiste. Si le violon est son instrument de prédilection, la façon dont elle exprime sa voix sur cet album est un instrument en soi.
Ses harmonies envoûtantes s’intègrent parfaitement à tous les aspects de l’album et créent un ensemble d’œuvres captivantes tant sur le plan sonore que visuel. L’album plonge dans les mondes atmosphériques de l’exploration sonore et cherche à trouver la tonalité et le but de tous les instruments utilisés.
En commençant l’album avec « Stories », Neufeld crée une expérience cinématographique tout au long de l’album qui peint continuellement une scène pour accompagner sa musique. Sans aucun texte sur l’album, sa musique doit raconter une histoire par elle-même ou être suffisamment vivante pour permettre à l’esprit de l’auditeur d’explorer. Sur « Stories », le décor est celui d’une nuit de tempête perdue en mer. On peut pratiquement sentir l’odeur du sel dans l’air alors que les voix dramatiques et l’influence celtique de la chanson créent une sensation étrange qui finit par mijoter dans le reste de l’album.
Par moments, l’album ressemble davantage à une longue partition de film qu’à un disque ordinaire. Des morceaux comme « Tumble Down The Undecided » commencent par des sous-entendus plus sombres et mystérieux avant de se transformer en un véritable cri de guerre. D’une durée de plus de 9 minutes, le morceau ne fait que s’accumuler jusqu’à son arrivée enthousiaste, sans aucune pause ni moment d’hésitation. Autre tentative cinématographique de l’album, « Shed Your Dear Heart », qui met en valeur les contributions des synthétiseurs et des percussions de l’album. Comme pour le morceau précédent, les thèmes intenses de la guerre ou du conflit semblent être le fil conducteur de ces chansons, les moments forts de l’album ne cessant de s’accumuler jusqu’à sa conclusion compliquée.
Alors que la seconde moitié du disque illustre des aventuriers sonores de grande envergure, Neufeld a décidé de conclure l’album sur un ton plus ambiant et discret. La chanson titre, « Detritus », ne se construit jamais jusqu’à une conclusion à grande échelle et adopte plutôt une approche poétique pour terminer l’histoire. L’intensité lente de la chanson ressemble à un battement de cœur qui s’éteint. Il est difficile pour les auditeurs de savoir où le morceau se dirige et, avec sa fin abrupte, l’ensemble de l’œuvre se termine par un cliff hanger tranquille mais soudain. Sur le papier, la fin du disque peut sembler insatisfaisante, mais les décisions prises par Neufeld tout au long de l’album sont tout à fait logiques sur le plan sonore. Bien que l’histoire ait été racontée, elle laisse encore de la place pour que les chapitres suivants se déroulent.
***1/2