L’artiste new-yorkais Kamron Saniee a qualifié sa musique électronique de « techno expressionniste abstraite ». Son parcours musical reflète celui d’artistes comme de Kooning, qui ont utilisé leur formation classique en peinture et en dessin comme tremplin vers des œuvres moins représentatives. Saniee est un violoniste et compositeur classique qui a même récemment donné des récitals de musique classique occidentale et persane. Quelque part, il a réalisé que la musique électronique pouvait toucher un public plus large et s’est intéressé aux sonorisations en direct et à la synthèse spatiale. Toutes ces influences se retrouvent sur l’étonnant nouvel EP de Saniee, Euphoric Studies. Avec un tel bagage, on pourrait s’attendre à ce que le travail de Saniee paraisse anodin ou académique, mais le titre de ce maxi est littéral.
Il s’agit d’une musique expérimentale intelligente qui connaît le genre d’euphorie que procure un soundsystem de club bien réglé. La composition de « Rhythm Force » ressemble à celle d’un jack track, mais ici la caisse claire est faite de bruit blanc et la grosse caisse est si rapide et insistante qu’elle pourrait presque être un drone claquant et rapide « Amnion », quant à lui, sonne comme si Rrose s’essayait à un morceau de footwork, une plaque étonnante de techno inspirée du Mills College. Sur « Euphoton », des percussions techno profondes se heurtent à une section de cordes synthétiques qui s’enflent dans une tonalité difficile à placer, ressemblant moins à une boucle qu’à l’inspiration et à l’expiration d’un orchestre en équilibre. Le design sonore d’Euphoric Studies est capiteux mais immersif, plaçant Saniee dans une classe rare de producteurs, comme Minor Science ou Rian Treanor, qui utilisent des techniques de composition et de production obliques au service de morceaux de club futuristes qui font appel autant à la tête qu’au corps.
***1/2