En ce sombre milieu de l’hiver, à une époque où la mort et le désespoir sont omniprésents, la folie semble être partout et l’ambiance des fêtes de fin d’année s’est presque dissipée. Peut-être est-ce le meilleur moment, mis à part la veille de la Toussaint, pour se plonger dans le côté sombre et instable de la musique country.
Silas J. Dirge est le pseudonyme d’un chanteur et compositeur néerlandais nommé Jan Kooiker, dont la passion singulière en musique est de raviver l’esprit gothique de la country et du folk qui a été capturé pour la première fois dans les passages des chansons de la Carter Family et d’autres, et qui a ensuite influencé certains des plus formidables contributeurs de la country, de Hank Williams à Johnny Cash.
Des « murder ballads »s aux chansons de folie et de misère, la country gothique a aussi sa part de propriétaires dans l’ère moderne, notamment les seigneurs du sous-genre comme Those Poor Bastards, Lonesome Wyatt and the Holy Spooks, et les Sons of Perdition, pour n’en citer que quelques-uns. Mais malgré la créativité débordante de ces projets, pour de nombreux spectateurs, cette musique peut être beaucoup trop feyante et sombre à leur goût, à part pour une bande sonore d’Halloween.
Silas J. Dirge et son nouvel album, The Poor Devil,revitalisent avec plus de précision et de respect les traditions gothiques de la musique country, où l’on peut entendre les fantômes des compositions précédentes remonter dans les passages et influencer l’approche, uniquement rendus dans des chansons nouvelles et originales. Ce sont des chansons qui transmettent le sentiment obscur et obsédant que seul le meilleur de la musique country gothique peut transmettre, et d’une manière qui ne se contente pas d’honorer et de préserver ces traditions, mais qui y contribue et aide à les faire progresser.
Sans rien perdre de la traduction, y compris l’ingrédient essentiel de la nuance, Silas J. Dirge propose une poésie imprégnée de racines, réglée sur des arrangements clairsemés, qui transmet habilement la beauté cachée derrière la musique roots sombre et pourquoi elle mérite encore une place dans le régime de la musique moderne, qu’il s’agisse d’une ballade meurtrière mélangée à une histoire de fantômes dans « Flowers on Her Grave » ou du message intemporel de la tentation dans « Devil’s in Town ».
Savoureux, mesuré et intelligent est une bonne façon de décrire comment Silas choisit d’habiller ces compositions, en faisant appel à un groupe de collaborateurs triés sur le volet, et en produisant des sons inhabituels sur des instruments familiers pour ajouter à l’ambiance troublée, sans toutefois demander à l’auditeur de s’aventurer trop loin dans un terrier de lapin.
En fin de compte, ces chansons sont issues d’une guitare acoustique, d’une voix et d’une histoire, tout comme les chansons country primitives d’autrefois. La voix féminine de Nicole Schouten sur l’instrumental « A Land More Kind Than Home », inspiré du Spaghetti Western, et d’autres morceaux contribuent à leur donner vie, tout comme le fait que Silas J. Dirge soit prêt à travailler à l’occasion sur des accords plus brillants au lieu de se fier uniquement à la tonalité mineure comme c’est le cas pour la musique gothique.
Bien que ce ne soit certainement pas le cas pour tout le monde, Silas J. Dirge parvient à un équilibre en défendant de manière authentique une forme de musique plutôt oubliée, tout en transmettant son attrait en mettant l’accent sur sa signature et ses attributs plus accessibles. Il est facile de rejeter cette musique comme étant trop archaïque. Mais ce sont des influences de la musique country souvent oubliées qui sont sans doute en augmentation. Après tout, Taylor Swift a sorti une « murder ballad » sur les ondes de la radio country grand public, pour rejoindre celle déjà existante d’Ashley McBryde dans « Martha Divine ». Peut-être que quelque chose se passe ici dont nous ne parlons pas assez.
Pour savoir où vous allez, vous devez savoir où vous êtes allé. Silas J. Dirge propose une feuille de route qui nous ramène aux influences plus sombres du country et du folk, qui sont de plus en plus utiles aux créateurs, car « les liens qui unissent » (ties that baind) continuent de s’effilocher aux extrémités et menacent de se défaire, et les créateurs cherchent à donner une voix aux humeurs sombres et aux pensées troublées que nous portons tous.
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