Si vous avez la chance de pouvoir envisager un nouveau départ, même avec un retard important, profitez-en. Ces indie-rockeurs d’Athens l’ont clairement fait. Plus d’une décennie après leur séparation, ils se sont réunis pour cet album de retrouvailles. Et cela vous fait souhaiter qu’ils ne soient jamais partis. Noueux et noueux, bruyants et désordonnés, glapissants et brouillons, revigorants et tout simplement magnifiques, ces dix morceaux au jeu de guitare tordu, à l’ambiance bruyante et à l’urgence décoiffante s’inspirent de tout, du rock de Detroit des années 70 et du post-punk des années 80 au punk et au math-rock des années 90 et post-grunge des années 2000, tout en restant assez frais et féroces pour séduire toute une nouvelle génération de fans. Parfois, vous avez une seconde chance de faire une première impression. Croisons les doigts pour qu’ils en tirent le meilleur parti.
Lorsque We Versus the Shark s’est formé en 2003, les membres du groupe avaient à peine 20 ans et vivaient dans trois états différents. Le quatuor math-rock a convergé vers le centre musical d’Athens, Géorgie, comme base d’attache et a rapidement pris d’assaut les portes de la ville. Dès leur premier album, Ruin Everything !, le groupe s’est lancé dans une folle aventure de guitares Dischord-ant, de synthés bruyants et de rythmes électrochocs.
Fantassins de l’armée du sous-sol, ils ont consciencieusement tourné le cul, se tortillant et se spasmant sur de petites scènes, dans leur pays et à l’étranger. Sept ans, un EP, une suite sombrement agressive (Dirty Versions) et un album de reprises plus tard, le groupe a mis un terme à sa carrière en 2009 et s’est à nouveau dispersé aux quatre vents. Avec WVTS dans le rétroviseur, le groupe a suivi ses propres chemins. La guitariste/chanteuse Samantha Paulsen a exploré le cosmos avec les scientifiques du surf Man… Or Astroman ? tout en obtenant son diplôme d’infirmière. Le guitariste/chanteur Luke Fields a poursuivi sa quête de sensations fortes sur scène (dans la formation rock nintendo Bit Brigade ainsi que dans le groupe de guitares Double Ferrari) et en dehors (en tant que passionné de montagnes russes). Le bassiste/chanteur Jeff Tobias joue du saxophone dans le quatuor psycho-jazz new-yorkais Sunwatchers et dans l’ensemble indie-folk londonien Modern Nature, parmi de nombreux autres projets. Le batteur Scott Smith s’est installé à Amsterdam pour travailler comme économiste, et publie du matériel sous le nom de President of the Drums. En 2015, en revisitant les démos d’archives, Fields a déterminé : il restait beaucoup d’or à filer et beaucoup de notes (croyez-nous, beaucoup) à jouer. Mettant la touche finale tant attendue à quelques pétards inachevés et débouchant quelques nouveaux joyaux, le groupe a tranquillement convergé dans la Classic City une poignée de fois au cours des années suivantes pour faire Goodbye Guitar. Ce LP de 10 titres est à la fois un retour énergique à la forme et une source de joie redécouverte. Avec leurs angoisses de jeunesse (pour la plupart) laissées dans le passé, Goodbye Guitar est le son de quatre personnes qui s’amusent à jouer ensemble. C’est un son hyper-mélodique et sans apologie du maximalisme, débordant de coups de guitare acrobatiques et d’humour inattendu. Alors que le monde tourne à plein régime, We Versus the Shark espère offrir une occasion de s’éclater à la guitare. Dites bonjour à Goodbye Guitar.
***1/2