Dernière parution de Sunn Trio, combo de Phoenix, qui complète l’attention portée par le groupe sur l’influence du son Sun City Girls dans leur vie. Cette troisième entrée de la Mount Meru Anthology ( (comme ils l’appellent) est aussi lourde et vertigineuse que tout ce qui figure dans le catalogue du groupe. Dirigé par les cordes de Joel Robinson, qui tord la guitare, l’oud et le bonang par le chas de l’aiguille psychédélique qui recoud le folk du Moyen-Orient, le disque est une force fulgurante. Rythmé, déchiqueté et transpirant de tous les pores, Electric Esoterica adopte le rythme et les accords du « desert bues » mais les fait passer à travers un filtre frit à l’aide d’un ampli. La guitare de Robinson vient de toutes les directions comme une tempête. Déchirant la peau et les sens avec la férocité du sable pressé sur le verre, les morceaux ici ne laissent pas beaucoup de place à la détente.
Outre l’influence des frères Bishop et de leur compagnon Gaucher, le groupe énumère une colère contre l’impérialisme américain et la tromperie entourant ses crimes de guerre au Moyen-Orient. Le groupe canalise la frustration liée à une politique tiède et à des manœuvres délibérément immorales dans la région dans une explosion sonore aussi frénétique que cathartique. Comme pour le sujet de leur trilogie et de nombreux contemporains sur le label Unrock, ils transforment le traditionnel en quelque chose de puissant, vécu physiquement d’une manière qui laisse l’auditeur épuisé mais revigoré. L’interaction entre les musiciens est cinétique : la basse et la batterie sont enfermées dans une volée de rythme qui va et vient et Robinson laisse le sang couler sur ses cordes encore et encore. Si Sunn Trio vous avait échappé jusqu’à présent, c’est un bon endroit pour commencer et travailler à rebours dans leur vibrant catalogue.
***1/2