En écoutant En Garde, on peut ressenti les mêmes sentiments que lorsque’on a pu entendre pour la première fois No Shape de Perfume Genius ou House of Sugar d’Alex G. Il y a, en effet, des signed de ces deux artistes deux dans cet album solo du multi-instrumentiste Ethan Gruska de The Belle Brigade, qui nous offre un mélange étourdissant de folk minimaliste et de pop d’avant-garde. La toile de fond de En Garde sonne comme un puzzle de plaques tectoniques mouvantes ; ce mélange d’esthétiques conflictuelles mais totalement dynamiques. Luxuriant, énergique et débordant d’idées nouvelles, En Garde marque un nouveau sommet pour la carrière solo de Gruska, aussi brillante qu’imprévue.
Le musicien met tout sur la table : des pianos envoûtants, des cordes florissantes, des courants électroniques sous-jacents, des explosions de synthétiseurs, des voix informatisées, et même une apparition de Phoebe Bridgers en tant qu’invitée. La première série de chansons vous emportera avec des mélodies à couper le souffle et un tourbillon de l’esthétique susmentionnée. « Maybe I’ll Go Nowhere » et « Event Horizon » sont des moments forts particulièrement spectaculaires, mettant en valeur la voix douce et chuchotante de Gruska dans des atmosphères de rêve où il est trop facile de se perdre. « Enough For Now », qui met en vedette le désormais vénéré auteur-compositeur-interprète, « Bridgers » qui est un véritable banger indie-pop noyé dans une mer de numéros lo-fi, tandis que « Another Animal » éclate de nulle part avec ses grooves au synthétiseur.
« Nervous System » défie ra, à l’inverse, toute l’aura d’En Garde avec des influences industrielles discrètes. « Dialing Drunk » est ironiquement assez sobre, une ballade vocale déprimante et pourtant pleine de portée qui semble avoir été co-écrite par Bruno Mars ce qui donne un opus qui album semble couvrir tout un spectre de sons sans jamais sembler aller trop loin ou s’étendre trop finement.
En revanche, il y a un domaine où En Garde n’impressionne pas beaucoup, c’est le département lyrique. Les vers sont utiles, mais ne sont pas très chargés d’émotion – ce qui fait que Gruska (du moins de manière perceptible) ne parvient pas à tirer parti de cette belle boule de neige tourbillonnante de sons avec un thème ou une déclaration d’ensemble. Pourtant, la musique fait un travail admirable en transportant toute cette expérience par elle-même, offrant une pléthore de moments envoûtants qui utilisent un large éventail d’instruments et d’effets de studio pour atteindre une maîtrise sonore. Il s’agit d’une musique indie-pop/folk innovante à son meilleur ; une déclaration de carrière pour Ethan Gruska qui aura certainement une certaine influence sur les prochaines sorties de cette décennie encore jeune.
***1/2