Après des années de collaborations fécondes avec Agnes Obel, Nils Frahm, Ólafur Arnalds et combien d’autres, la violoncelliste allemande Anne Müller fait pour la première fois œuvre seule, et pas seulement en partie : entièrement. Piano, violoncelle, arrangements, tout est d’elle — et même le titre, du nom de la frontière entre le puissant vent solaire et l’espace interstellaire où les tensions doivent supposément se résoudre, est en phase avec ce retranchement soudain.
Heliopause incarne ainsi un voyage qu’on dira initiatique : avec ses glissandos de cordes raides, ses voix humaines comme des apparitions, son contrepoint et ses arpèges venteux, ses variations au violoncelle (robuste « Solo ? Repeat ! ») et son concert d’irradiations, la fracture est évidente. Le monde nouveau où se trouve Anne Müller, bien qu’indéfini, est terriblement présent. On pourra lui trouver une certaine austérité rationnelle, mais ce premier album reste d’une maîtrise absolue et emmène en apesanteur, là où tout reste à réinterpréter, même soi.
***1/2