S’intéresser à la scène musicale islandaise, c’est savoir que celle-ci regorge de talents et ne se limite pas seulement à Björk ou Sigur Rós. Les musiques froides y sont dignement représentées par le trio féminin Kaelan Mikla, l’un des groupes les plus excitants de ces dernières années au sein de la mouvance dark wave, dont Sólveig Matthildur assure les synthés et une partie du chant. Après une première escape solo en 2016 avec son très beau premier album Unexplained Miseries & The Acceptance Of Sorrow, Sólveig revient avec Constantly In Love.
Si son premier effort était assez cinématographique et flirtait parfois avec l’ambient, ce nouvel opus se révèle plus direct dès la première écoute, avec une voix nettement mise en avant. Le premier « single » « Dystopian Boy », en est l’illustration parfaite : un morceau efficace, dansant avec un refrain qui reste en tête et l’apport incontestable de Deb Demure (Drab Majesty) : une guitare qui signe une ligne magnifique. Le morceau miroir, « Utopian Girl » est tout aussi réussi avec ses répétitions phrasées et lancinantes.
À l’image de ces deux titres, plusieurs autres morceaux sont construits à la manière d’un diptyque (« My Desperation »/ « Your Desperation » ou encore « Constantly in Love » « Constantly Heartbroken »), Matthildur y navigue entre l’anglais et l’islandais en évoquant de manière poétique des thèmes universels : l’amour perdu, le spleen, les rêves. Musicalement, l’album contient son lot de petites bombes dark wave (« My Desperation » /« Your Desperation »,notable par son excellent remix) mais aussi des morceaux plus planants comme le titre éponyme et sa sublime ligne de synthés ou encore « My Father Taught me how to Cry », véritable crève-cœur.
Difficile de ne pas être conquis par la voix puissante et parfaitement maîtrisée de Sólveig Mathildur, utilisée comme un instrument à part entière. Écouter simplement « Constantly heartbroken » pour s’en convaincre. Le dernier titre, « The End », vient renforcer cette impression : départ en douceur avec longue introduction au synthé puis montée progressive en puissance, magistrale, grâce à la voix de l’Islandaise. Avec ce deuxième album, Sólveig Matthildur poursuit son émancipation et s’affirme comme l’une des artistes les plus importantes de la scène dark wave et au-delà. Avec des mélodies accrocheuses, des « featuring » de qualité (elle partage le titre « I’m OK » avec Some Ember) et une authentique signature vocale, elle signe, en termes de dark wave, un des meilleurs albums de l’année.
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