Sonny Smith a porté plusieurs casquettes tout au long d’une carrière musicale assez prolifique confectionnant, tel un artisan, une myriade de chansons sous couvert de groupes fictifs. Son précédent opus était un disque de alt-country, Longtime Companion, avec Antenna To The Afterworld il s’attaque au space-rock et explore les concepts de mortalité, de romantisme et d’identité, le tout servi sous un enrobage garage-pop garni de synthétiseurs.
Ce genre a toujours été considéré comme un artifice, une phase transitoire, permettant à un artiste de dramatiser certaines histoires en les plaçant dans un environnement étranger. Le choix aurait été d’approfondir sérieusement le côté « space » à grands renforts de drones ou utiliser le rock basique et convenu comme instrument de détournement.
Smith a choisi de rafraîchir le genre en utilisant les éléments de science-fiction pour explorer la psyché humaine. Les directions qu’il va utiliser seront celles du garage-rock, de la country rétro et surtout celle d’un jeu de guitare indolent allant de pair avec des arrangements primitifs. La ballade « Path of Orbit » mêlera ainsi douceur pop et émotion exacerbée, avec des climats oscillant entre soleil et ombre, « Void » va cheminer sur les lisières de la folies à grand renfort d’accords de claviers frénétiques et « Mutilator » jouera habilement de la concomitance entre séduction et maléfice.
Si on devait relier Antenna To The Afterworld à un écrivain de science fiction, ce serait certainement plus Vonnegut ou Van Vogt que Heinlein, dans la mesure où toute intrigue est prétexte à une interrogation spirituelle. Le titre qui clôturera l’album, « Green Blood », en est comme l’apogée, mettant en scène une conversation entre un humain et un cyborg parcourue par une suite d’accords en crescendo. Celle-ci est si bizarre qu’elle en devient charmante et qu’elle suscite empathie. Alors que Ziggy Stardust utilisait l’idiome rock pour en faire une extension de l’aliénation et de l’isolation ne laissant comme seule issue que la mort, Sonny Smith explore un « afterworld » dans lequel ce qui s’annonce est une réparation, un peu comme si la power-pop d’un titre aussi révélateur que « Primitive » retrouvait sa source non pas dans des rêveries sidérales mais dans ces chansons primales énoncées au coin d’un feu de camp dénicheur de sens et d’âme.
Pour Smith, la composition a toujours été un jeu étrange. Ça n’est pas un moindre paradoxe que ce soit l’exploration de l’extra-terrestre en nous et hors de nous qui représente la possibilité de réconciliation des contraires. Ce nouvel album, loin d’être une conceptualisation est peut-être l’album le plus humainement réaliste jamais produit par Sonny Smith, un équilibre on ne peut plus idéal entre pop songs et réflexions existentielles.