Tout étonnant que cela puisse paraître, Eat Skul est un groupe qui parvient à cumuler noise pop à approche lo-fi. Pour cela, ce combo de Portland emprunte ses influences dans une façon d’enregistrer semblable à ce que faisait Guided By Voices à ses débuts, à savoir le « home recording » et ses premières amours à savoir le hardcore.
Sa pop va donc être assez sombre et immédiate mais enterrée sous d’assez importantes couches instrumentales. Des morceaux comme « How Do You Know When To Say Goodnite ? » et « Dead Horses » sont ainsi témoignages d’une pop récitative et presque primaire dont l’impact est amplifiée par les assonances des vocaux. On peut y entendre un lointain écho des Go-Betweens avec une sensation d’esthétique lo-fi passée au crible d’un micro qui aurait été posé dans une pièce par hasard. Cette impression d’amateurisme est pourtant trompeuse et le laisser aller est soigneusement canalisé. On sent que les effets sonores très connotés Beatles sur « Goodnite » ou ceux, plus menaçants, de « Twin Sikk Moons », émanent d’une construction mûrement élaborée puisque, entre ces deux titres, figure un « Stupid Moon » dont les synthétiseurs gargouillants accompagnent l’ébranlement annoncé. « Summer Inside » et ses vocaux fantomatiques n’aura aucun mal à nous embarquer dans ce voyage austère dont la tonalité chaloupée se poursuivra avec le « singalong » ravagé de « Amnesty Box ».
À ce niveau-là, Eat Skul maîtrisera parfaitement usage de l’électro minimaliste sur des refrains acoustiques, preuve supplémentaire qu’une démarche « slacker » ne s’improvise pas. Gardons pour la fin « Space Academy » qui ouvre III avec une chanson pop essentielle, comme pour montrer que cette sensibilité ne sera pas obscurcie par l’étrangeté d’arrangements sonores au minimalisme sauré.




